MAMAN
Le moment est venu de libérer le fruit Qui pousse dans la
serre tempérée de ta nuit L'enfant pour voir le jour déchire le
rideau Déjà il est douleur à ta chair, à ta peau. Eclos il va germer
semant peines et joies L'esclave de ton palais c'est toi, lui il est
roi. Acteur de comédie toujours insatisfait Il te réveille la nuit pour
réclamer ton lait Il teste ta cuirasse, éprouve ta volonté Sonde sur
tes limites jusqu'où il peut aller. Lors l'apprenti canaille se délecte des
fureurs Déclenchées malgré lui, innocent petit cœur La monnaie d'un
sourire, la tendresse d'un câlin Suffisent pour effacer les dettes du
malin. La barque de tes bras est le plus sur refuge Ou il court se blottir aux prémices d'un
déluge.
Asphyxié par l'amour exclusif encombrant Peu à
peu il desserre les liens envahissants Tu guettes en retrait le moindre de
ses faux pas Infirmière toujours prête à secourir l'ingrat. S'il pose sa
brosse à dents sur une autre étagère Tu redoutes à l'avance la menace
étrangère La rivale effrontée lui chavire la tête Reléguant ta présence au
fond des oubliettes. Il arrive qu'au mérite d'une certaine patience Se voit désaltérée ta soif de confidences.
Et coulent les années d'eaux calmes et
de torrents Sous le pont de ton cœur, plissant de rides ton
front. Spectatrice attentive de sa vie trajectoire Tu ignores ses
défaites, célèbres ses victoires. Tu débordes le trop plein de ton amour de
mère Sur sa progéniture flattée d'être grand-mère Le juvénile visage te
rappelle son enfance Commence dans ce miroir le jeu des
ressemblances. Hélas ailleurs aussi une autre mamie partage Les mêmes
émotions, les mêmes joies. Dommage !
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