LE VIEILLARD
C'est difficile pourtant tu peux me croire enfant Que le
vieillard assis sagement sur le banc A connu de la vie en son temps le
printemps Belle plante regardée et parfois arrogant Dans sa tête cheminée
a grésillé aussi Des brasiers d'illusions, des flambées d'utopies Des
espoirs enflammés d'un avenir meilleur De ces cendres espérances quelques
tisons demeurent La vieille peau froissée dissimule des histoires Bien sûr
elle fût acné puis plut à des regards Frissonnât chair de poule sous la plume
de caresses Connut ses heures de gloires, ses moments de détresse Les
muscles avachis ont fait les fanfarons Pour les beaux yeux des filles, la
fierté d'une maman Observe bien ses yeux derrière les interstices Une
lueur apparaît dévoilant la malice Contaminant les lèvres leur tirant un
soupire Où autrefois naissaient les charmes d'un sourire C'est le rictus
moqueur d'un bilan imparfait Qui hésite entre rire ou pleurer des
regrets Caché sous un mouchoir bien au fond de ses poches Pèse sur sa
conscience le poids de ses reproches Il est seul à connaître au tableau
d'affichage Le score secret du lâche et celui du courage Le beau costume
d'orgueil de sa tenue d'été Au sommet de sa forme le voyait parader Entrant
au bal masqué à son tour dans la ronde Des apprentis sorciers croyant refaire
le monde Les poids morts égoistes s'annoncèrent trop nombreux La mise trop
timide pour transformer l'enjeu Manquant de conviction dans son habit
d'acteur L'automne l'a renvoyé au rang de spectateur Ne lui laissant que
l'arme de son indignation Pour condamner le choix de certaines
directions Il se sait arriver au bout de son hiver N'est pas inquiet pour
lui mais redoute pour la terre N'accroche pas larmoyant les rampes de la
fin Car la mort c'est la vie et il l'attend serein.
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