| |
Un deuil
dangereux
Anne
PERRY
Dans Le
Londres des années 1850, Octavia Haslett, la fille de Sir Basil Moidore, est
retrouvée poignardée dans sa propre chambre. Tout porte à croire qu'elle aurait
surpris un cambrioleur en train de dérober des bijoux. L'inspecteur
William Monk, homme ambitieux et intuitif à l'esprit caustique, est chargé de
l'enquête. Il écarte rapidement la piste d'un rôdeur pour se concentrer
sur la vaste demeure située dans Queen Anne Street. Pour lui, une certitude,
l'assassin, un domestique ou un membre de la famille, loge dans la
maison. Entre l'animosité de son supérieur, très respectueux des
conventions et de l'ordre établi, qui le presse de trouver rapidement le
coupable et l'hostilité de l'influente et puissante famille Moidore, sa marge
de manœuvre est étroite. Heureusement qu'il peut compter sur la complicité de
Hester Latterly, engagée comme garde-malade par Lady Béatrice
Moidore.
Une intrigue
maîtrisée et bien menée, une enquête policière bien ficelée avec en toile de
fond une plongée dans le Londres des années 1850. La description sans
complaisance du fossé qui sépare la mentalité de la haute société du reste de la
gente domestique vivant sous le même toit.
| |
| |
Extraits
:
- Octavia
Haslett, la fille de Sir Basil, a été assassinée. Elle était veuve. On
l'a retrouvée poignardée. Il semble qu'elle ait surpris un cambrioleur en train
de dérober des bijoux. A ce qu'il paraît, ajouta-t-il en cessant de sourire,
vous êtes notre meilleur élément. Voyons voir si vous pouvez mener cette enquête
avec plus de doigté que vous n'en avez manifesté dans l'affaire
Grey. Monk savait ce qu'entendait son supérieur : ne brusquez pas la
famille, ce sont des gens de qualité, et non des frustes comme nous autres.
Montrez-vous respectueux, non seulement dans vos paroles, mais surtout dans vos
découvertes.
Une série de
sentiments se succédèrent sur le visage de son supérieur. L'inspecteur
lut d'abord la terreur face aux répercussions politiques qui ne manqueraient pas
si Monk se mettait à offenser certaines personnes, et surtout s'il portait des
accusations sans disposer de preuves irréfutables. Puis une lueur d'espoir
s'alluma dans le regard de Rancorn, sans doute à l'idée qu'un simple faux pas
pouvait précipiter un désastre et entraîner la perte de Monk, qui cesserait dès
lors de représenter une menace.
Hester quitta
Monk considérablement calmée. Cette rencontre avec l'inspecteur lui
avait rappelé qu'elle ne vivait pas dans une maison ordinaire. Ces triviales
divergences de vues, ces méprisables querelles qui opposaient les habitants
avaient pris, à un moment donné, des proportions démesurées et conduit à une
mort violente et imprévisible. Et l'un de ceux avec qui elle partageait chaque
jour ses repas ou qu'elle croisait sur le palier avait poignardé Octavia en
pleine nuit et laissé la jeune femme se vider de son
sang.
| |
| |
Anne
PERRY
Anne Perry,
de son vrai nom Juliet Hulme, née à Blackheath près de Londres, le 28 octobre
1938, est un auteur britannique de romans policiers victoriens. Elle
est la fille d'Henry Hulme, astronome, physicien nucléaire et mathématicien et
d'une mère de confession presbytérienne. En vue de soigner la
tuberculose dont l'enfant était atteinte, sa famille l'envoya d'abord dans des
sanatoriums situés aux Antilles puis en Afrique du Sud. Le choix de
son père d'accepter en 1948 sa nomination comme recteur de l'Université de
Canterbury, proche de Christchurch (Nouvelle-Zélande), a certainement été
influencé par la possibilité de faire soigner l'enfant dans un des nombreux
sanatoriums réputés du pays (on trouve la trace de cette spécialisation dans
l'œuvre de Ngaio Marsh, autre reine du crime et néo-zélandaise). La jeunesse
d'Anne Perry fut mouvementée, puisqu'elle fut poursuivie et condamnée, en 1954,
pour le meurtre de la mère d'une " amie très proche ", accompli avec celle-ci.
Cet épisode tourmenté de sa vie, ayant eu comme théâtre la Nouvelle-Zélande où
elle vivait alors, est directement à l'origine du film Créatures célestes
(1994), co-écrit et co-produit par Frances Walsh et son mari Peter Jackson, qui
en assurera la réalisation. Elle semble avoir bénéficié d'une mesure
de clémence, puisque la famille regagnera le Royaume-Uni en 1959, cinq ans après
le drame. Son besoin d'écriture semble avoir toujours existé, en tout
cas dès ses premières hospitalisations dans son enfance, marquées par des
échappées dans l'imaginaire (elle cite fréquemment Alice de Lewis Carroll), mais
il lui faudra attendre une vingtaine d'années avant de voir ses efforts
couronnés de succès par la publication en 1979 de L'Étrangleur de Cater Street,
premier d'une longue série de succès mérités. Le temps ne semble pas
avoir toutefois effacé toutes les blessures éprouvées dans sa jeunesse par Anne
Perry, puisque tous ses romans policiers victoriens témoignent d'une révolte
contre la " bienséance pudibonde dont s'affuble la bonne société victorienne "
(selon les termes du Bulletin critique du livre français). Elle vit
désormais en Écosse. Sans délaisser sa " spécialisation victorienne ",
elle a toutefois mené quelques incursions dans le domaine de la littérature
fantastique et a entrepris une nouvelle série policière ayant pour cadre le
Paris de la Révolution française, puis une autre ayant pour cadre la Première
Guerre mondiale.
| |
| |
|
|