Le chercheur d'or
 

de J.M.G.  Le Clézio
 
 
 
  Nous sommes en 1892, Alexis, le narrateur, a huit ans et vit insouciant et heureux entouré de l'affection de sa sœur Laure et de Mam, sa maman, dans leur maison du Boucan en un lieu exotique et paradisiaque du côté de l'île Maurice, Mananava .
 Que de bonheurs à lire et rêver avec Laure dans le grenier de la vieille maison, à s'échapper découvrir la pêche en compagnie de son copain Denis, à écouter la voix douce de sa maman enseigner.
  Hélas la faillite puis la mort de son père les obligent à quitter ce paradis terrestre.
  Adolescent, travailler dans un bureau n'est pas fait pour lui, l'appel du large est trop fort. Il quitte l'île Maurice à bord du Zeta pour partir à la recherche du trésor d'un corsaire indiqué sur des plans trouvés dans une malle de son père. A défaut d'or, sa quête solitaire, chimérique, désespérée sur l'île de Rodrigues le fait rencontrer l'amour en la personne de la jeune Ouma.
 Puis c'est la guerre 14-18. Il s'enrôle dans l'armée anglaise, embarque pour l'Angleterre, puis direction la France, les tranchées de la Somme.
  De retour en 1922 à l'île Maurice, il rejoint Laure et assiste à la mort de Mam. Il revient à Rodrigues à la recherche d'Ouma. Nostalgique de son enfance heureuse, il se replie ensuite à Mananava sur les traces de son passé. La boucle est bouclée.
  Alexis aura mis trente ans à comprendre qu'il n'y a de trésor qu'au fond de soi, dans l'amour et l'amour de la vie, dans la beauté du monde.

  Merci, Monsieur Le Clézio, pour ce magnifique voyage à bord du Chercheur d'or . Vous racontez si bien chaque port, de Madagascar jusqu'à la côte d'Afrique. Avec vous mon âme d'enfant s'est laissée piloter de Zanzibar aux Chicos. Elle s'est laissée glisser en toute confiance sur les vagues, légère, aériennne, sous la lumière des étoiles. J'ai écouté, avec Alexis, des histoires de ports, de tempêtes, de pêches, de filles. Des histoires sans but et sans fin comme sa propre vie.
 
 Non seulement je n'ai pas été déçu, mais j'en redemande. J'embarquerai volontiers dans vos autres aventures, vos autres lectures.
 
 
 
 
 

Extraits : 
 
 

 Un jour , en fin d'après-midi, comme je reviens d'une longue errance avec Denis dans les bois, du côté des gorges, j'aperçois mon père et Mam sur la varangue. Laure est à côté d'eux, un peu en retrait. Mon cœur me fait mal, parce que je devine tout de suite qu'il est arrivé quelque chose de grave pendant que j'étais dans la forêt. J'ai peur aussi des réprimandes de mon père. Il est debout près de l'escalier, l'air sombre, très maigre dans son costume noir qui flotte sur lui. Il a toujours sa cigarette entre le pouce et l'index de la main droite....
 
 

  C'est mon père qui nous a apprit à aimer la nuit. Parfois, le soir, quand il ne travaille pas dans son bureau, il nous prend par la main, Laure à sa droite et moi à sa gauche, et il nous conduit le long de l'allée qui traverse le jardin jusqu'en bas, vers le sud. Il dit : l'allée des étoiles, parce qu'elle va vers la région du ciel la plus peuplée. En marchant il fume une cigarette, et nous sentons l'odeur douce du tabac dans la nuit, et nous voyons la lueur qui rougeoie près de ses lèvres et éclaire son visage. J'aime l'odeur du tabac dans la nuit...
 

 Je pense encore à son regard, avant qu'elle ne se détourne et ne marche vers la route qui longe la voie ferrée. Je ne peux oublier cette flamme qui a brillé dans ses yeux au moment où nous nous sommes quittés, cette flamme de violence et de colère. Alors j'ai été si surpris que je n'ai su quoi faire, puis je suis monté dans le wagon, sans réfléchir. Maintenant, sur le pont du Zeta, avançant vers un destin que j'ignore, je me souviens de ce regard et je ressens la déchirure du départ.
Peut-être qu'ainsi j'apprendrai à ne plus poser de questions. Est-ce qu'on interroge la mer ? Est-ce qu'on demande des comptes à l'horizon ? Seuls sont vrais le vent  qui nous chasse, la vague qui glisse, et quand vient la nuit, les étoiles immobiles qui nous guident.
 
 
 
 
 
 
 
 
 
J.M.G. Le Clézio
 

J.M.G. Le Clézio est né à Nice le 13 Avril 1940
Il est originaire d'une famille de Bretagne émigrée à l'île Maurice au XVIIIéme siècle.
Il a poursuivi des études au collège universitaire de Nice et est docteur ès lettres.
Malgré de nombreux voyages, J.M.G. Le Clézio n'a jamais cessé d'écrire depuis l'âge de sept-huit ans : poèmes, contes, récits, nouvelles, dont aucun n'avait été publié avant Le procès-verbal, son premier roman paru en septembre 1963 et qui obtient le prix Renaudot. Son œuvre compte aujourd'hui une trentaine de volumes. En 1980, il a reçu le Grand Prix Paul-Morand décerné par l'académie française pour son roman, Désert.
 
 
 

 
 
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