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Sourires de
loup
de Zadie
SMITH
Tout commence par le suicide raté d'Alfred
Archibald Jones, 47 ans, un jour de nouvel
an.
Dans son
break rempli de vapeurs d'essence, Archie attend sa fin en espérant que la
sentence divine ne sera pas trop sévère. Mais le propriétaire de la boucherie
halal réputée en face de laquelle il s'est garé ne l'entend pas ainsi : interdit
de se suicider chez moi. On n'a pas d'licence pour les suicides ici. Nous, on
est halal, kasher, vous comprenez, m'sieur ? Si vous voulez mourir dans cet
établissement, va d'abord falloir qu'on vous saigne.
Archie reprend vite goût à la vie en rencontrant Clara
Bowden, une superbe jamaïcaine, de vingt huit ans sa cadette, qui n'avait pas
besoin de soutien-gorge - elle était totalement indépendante, même vis à vis de
la pesanteur. Il est immédiatement conquis lorsqu'elle lui adresse un large
sourire qui affiche sans doute sa seule imperfection : une totale absence de
dents du haut. Six semaines plus tard ils sont mariés. Hélas Archie se heurte en
permanence entre la vie telle qu'elle est, son sens moral, ses convictions et
son entourage dont Samad…
Samad Miah Iqbal, bengali serveur dans un restaurant
indien, le meilleur ami d'Archie, ce qui n'empêche pas leurs incessantes
disputes. Ils se connaissent depuis 1945, l'époque où ils étaient soldats. Samad
est l'époux d'Alsana, très traditionaliste et très religieuse. Elle lui
donnera deux jumeaux Magid et Millat qui ne se sent ni musulman, ni chrétien, ni
anglais, ni bengali. Il rejoindra le groupe extrémiste KEVIN ( Keepers of the
Eternal and Victorious Islamic)…
La troisième famille est celle d'intellectuels anglais,
les Chalfen (troisième génération, origine : Allemagne et Pologne, vrai nom :
Chalfenovsky) chez qui Magid, devenu un emmerdeur de première, au retour de 8
ans au Bangladesh, s'est installé pour aider le professeur Marcus Chalfen,
spécialiste en manipulations génétiques à lancer Souris du
futur.
Et puis il y a la grand-mère Hortense, adepte des Témoins de
Jéhovah, qui attend la fin du monde de pied ferme…
Une peinture au vitriol d'un Londres multiethnique,
haut en couleurs, avec ses accents coupés au couteau. Le Londres de White
Chapel, où se côtoient Irlandais, Pakistanais, Bangladais,
Jamaïcains…
On reste pantois devant une telle connaissance de
l'âme humaine, une virtuosité si flagrante, alliées à tant de jeunesse et de
panache.
On est emporté de plaisir, balayé, par cette saga
familiale intense, qui va des années 70 aux années 90 avec un détour par la
seconde guerre mondiale. C'est drôle et sérieux à la fois, c'est coloré à
souhait et raconté avec une énergie, une intelligence et un sens de l'humour
étonnant et décapant.
Zadie SMITH
Née d'un père anglais et d'une mère jamaïcaine, Zadie
Smith est élevée dans la banlieue de Londres. En 2001, alors qu'elle est encore
étudiante à Cambridge, elle publie 'Sourires du loup', qu'elle a écrit
à l'âge de vingt et un ans. Vendu pour deux millions et demi de francs à la
foire de Francfort sur la foi de cent pages (alors qu'il en comporte 500), le
roman remporte un franc succès et la jeune écrivain décroche les prix Whitbread
et Guardian du premier roman. Elle publie son second roman, 'L' Homme à
l'autographe', en 2005. En 2007 paraît en France 'De la
beauté'.
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