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La
pitié dangereuse
de Stéphane
ZWEIG
Nous sommes en 1913. Anton, un jeune officier plutôt pauvre est en garnison dans
une petite ville autrichienne, juste avant la Première guerre mondiale.
L'homme le plus riche de la région convie les officiers à une soirée.
Un peu grisé, Anton invite après le repas Edith, la fille de la maison, à
danser. Hélas pour lui elle est infirme. Pour se faire pardonner, il lui fait
envoyer des fleurs. Pour lui être agréable, il accepte de retourner la voir et
multiplie les visites sans réaliser qu'elle en devient amoureuse. Peu à peu, par
pitié, il se laisse emprisonner dans une relation qu'il ne maîtrise plus, faite
de petits jeux et de fausses promesses. Il tente de s'échapper, s'en veut de sa
lâcheté, veut tout rattraper en sacrifiant son existence à cette fille mais
l'assassinat de Sarajevo empêche l'arrivée du télégramme. C'est l'irruption de
la grande histoire dans la petite. La guerre a cette capacité, pour un officier,
à effacer l'ardoise de sa mémoire sauf
que : " aucune faute n'est oubliée tant que la conscience s'en
souvient. "
Un roman passionnant, fort, sans pitié, dérangeant,
qui frappe par l'intelligence et la justesse de sa description :
" Il y
a deux sortes de pitié. L'une, molle et sentimentale, qui n'est en réalité que
l'impatience du cœur de se débarrasser au plus vite de la pénible émotion qui
vous étreint devant la souffrance d'autrui, cette pitié qui n'est pas du tout la
compassion, mais un mouvement instinctif de défense de l'âme contre la
souffrance étrangère. Et l'autre, la seule qui compte, la pitié non sentimentale
mais créatrice, qui sait ce qu'elle veut et est décidée à persévérer avec
patience et tolérance, jusqu'à la limite des forces humaines.
"
Stefan
SWEIG (1881-1942)
Fils d'un riche industriel israélite, Stefan Zweig a
grandi dans la Vienne impériale et cosmopolite.
Docteur en philosophie, il fait preuve d'un
insatiable appétit culturel. Ses premiers poèmes obtiennent le Prix Bauernfeld,
une des plus hautes distinctions littéraires de son pays. Il se lie d'amitié
avec son compatriote Freud et le poète belge Verhaeren. Au cours d'un séjour à
Paris, il adapte 'Volpone' en compagnie de Jules Romains. Ses nombreuses
traductions de poésie française et ses essais concernant des auteurs célèbres
témoignent de sa grande érudition.
Suite à la Première Guerre mondiale, choqué, il
milite pour le pacifisme à l'instar de Romain Rolland. Mais en 1933, ses livres
sont brûlés en autodafé. Angoissé par la montée du nazisme et par la vision
d'une Europe qui se déchire, il fuit en Angleterre, aux Etats-Unis, et
finalement au Brésil où il décide de se donner la
mort.
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